Mitry-Mory ► Lycée Balzac : les personnels mobilisés dénoncent l’échec de la politique gouvernementale face à l’épidémie

Communiqué du personnel mobilisé du lycée Balzac, à Mitry-Mory, jeudi 1er avril – 

A la suite de l’allocution du président de la République du mercredi 31 mars 2021, les personnels mobilisés du lycée Honoré-de-Balzac, à Mitry-Mory, dénoncent l’échec de la politique gouvernementale face à l’épidémie de Covid-19.

Nous avions alerté dès la première vague sur l’absence de mesures efficaces et transparentes pour endiguer l’épidémie. Après un premier confinement, la rentrée 2020 n’a pas été préparée, exposant les élèves, les familles et les personnels à un risque élevé de contamination.

Nous avions pourtant alerté nos hiérarchies sur les risques d’une rentrée sans prise en compte de la situation sanitaire. Malheureusement, dès le mois d’octobre, la deuxième vague nous a contraints à exercer notre droit de retrait, ce qui a permis dans notre lycée le passage en demi-groupes. Ces mesures locales appliquées de manière inégale sur tout le territoire n’ont pas suffi.

Depuis le mois de janvier, et l’arrivée de nouveaux variants que le chef de l’État a qualifiés lui même de « plus meurtriers », de nombreux lieux publics ont été fermés et des libertés restreintes sans que rien ne soit jamais pensé pour les établissements scolaires. Aucune réelle campagne de dépistage, un suivi lacunaire et opaque de l’ARS, des consignes fluctuantes sur l’isolement des cas positifs et des cas contacts, aucun moyen humain supplémentaire à l’infirmerie, aux services d’entretien et de restauration, à la vie scolaire pour continuer à accueillir dans des conditions acceptables les élèves et assurer nos missions pédagogiques.

Ce n’est pas faute, de notre part, d’avoir depuis longtemps formulé ces observations et ces revendications qui n’ont reçu aucun écho favorable. Le ministre s’est contenté de discours mensongers et de renvoyer la responsabilité à l’échelle locale et aux familles. Ce déni ne pouvait qu’aboutir à une crise et une troisième vague plus violentes que les précédentes.

La situation actuelle marque donc un échec du gouvernement, loin des discours d’auto-congratulation du chef de l’État et de ses ministres. La fermeture des établissements scolaires est une conséquence de leur inaction et de leur mépris. Elle ne suffira d’ailleurs pas à freiner la circulation du virus, en l’absence de mesures efficaces dans d’autres domaines : fonctionnement des entreprises, des commerces et des transports, politiques de tests et de vaccination… Sans oublier que les services de santé souffrent toujours d’un manque de moyens et de personnels.

Les semaines du 5 avril et du 26 avril, nous allons devoir travailler avec nos élèves à distance. Le refus dogmatique du ministre d’envisager la fermeture des établissements a empêché l’Education nationale de se préparer à ce mode de fonctionnement inhabituel. Aucune leçon n’a été tirée du confinement du printemps 2020, les demandes et propositions des personnels ont été ignorées, et nous nous trouvons donc dans une situation similaire aujourd’hui, avec autant de problèmes non résolus :

  • Les outils numériques mis à disposition par l’Éducation nationale et la Région, dysfonctionnant déjà en temps normal, risquent de défaillir dès le premier afflux de connexions. Beaucoup d’élèves et de personnels seront privés des moyens de communiquer et de travailler, ou tentés de pallier ces défaillances comme l’an dernier, en s’épuisant à bricoler des alternatives et en multipliant les applications utilisées, y compris les moins sécurisées.
  • Les conditions de travail des élèves à la maison, notamment l’équipement informatique de leur famille et leur accès à internet, sont très inégales. Ces inégalités sociales face à « l’enseignement » à distance ont été largement soulignées par le gouvernement pour refuser la fermeture des établissements, mais il ne propose rien pour y remédier.
  • L’équipement et les moyens de communication des personnels pour travailler depuis leur domicile restent en majeure partie à leur charge.
  • La situation des professeurs qui ont des enfants n’a pas été réfléchie : nos collègues devront donc travailler tout en s’occupant de leurs enfants ou solliciter une autorisation spéciale d’absence, en sachant qu’aucun remplacement ne sera assuré.
  • Aucun cadrage pédagogique n’a été proposé par le ministère, ni même un début de concertation sur le sujet de l’enseignement à distance. C’est donc à l’échelle locale des établissements, voire à l’échelle individuelle de chaque enseignant que sont renvoyées d’innombrables questions : faut-il essayer d’avancer les programmes ? Noter les travaux rendus ? Organiser des séances en visioconférence, et à quelle fréquence ? Quelle quantité de travail donner aux élèves ? Comment se coordonner efficacement entre enseignants ?

À l’issue de cette période de distanciel, le gouvernement prévoit un retour en présentiel le lundi 3 mai. Nous nous interrogeons sur les conditions de cette reprise, tant sur l’aspect sanitaire que pédagogique. Sur le plan sanitaire, l’annonce d’une reprise en mai sans aborder les points suivants est ubuesque :

  • des mesures concrètes de vaccination s’adressant à l’ensemble de la communauté éducative, et non pas de vagues effets d’annonce ;
  • la distribution de masques suffisamment protecteurs et en quantité suffisante pour tous les personnels et usagers ;
  • le contrôle systématique et quotidien de la qualité de l’air dans chaque salle ;
  • le recrutement des personnels suffisants et le remplacement des personnels absents, notamment en Vie Scolaire, et dans l’équipe d’entretien pour garantir le nettoyage et la désinfection régulière des locaux.

Sur le plan pédagogique, le déroulement du troisième trimestre doit faire l’objet d’annonces rapides et claires. Nous ne pouvons pas continuer à découvrir tous les quinze jours quel va être le fonctionnement de la période suivante. Cela conditionne notre capacité à organiser notre travail et à maintenir la motivation de nos élèves. Il faut en particulier clarifier rapidement les modalités du baccalauréat 2021 et des  épreuves anticipées. Nous avons toujours été attachés aux épreuves finales en juin, avec des aménagements de programmes, conscients que le contrôle continu ne pouvait qu’accentuer les inégalités entre les élèves. Cependant, leur maintien ne nous semble aujourd’hui plus possible, et ne garantirait plus l’égalité de traitement des candidats, en l’absence de cadrage national pour l’organisation des cours depuis novembre.

Nous demandons donc l’annulation pour cette session 2021 des épreuves de français et de philosophie, et continuons de demander la suppression définitive du grand oral. 

La situation actuelle impose aussi de réfléchir aux conditions de la rentrée de septembre 2021, et des moyens qui seront alloués pour remédier aux difficultés accumulées par les élèves et assurer la sécurité sanitaire de toutes et tous. Pour l’heure, le gouvernement ne prévoit aucun moyen supplémentaire, et confirme la suppression de milliers de postes.

Jean-Michel Blanquer est responsable de l’impasse sanitaire et pédagogique dans laquelle nous nous trouvons. Son départ est nécessaire.