Villeneuve-sous-Dammartin/Annet-sur-Marne ► Déchets inertes : l’accord qui valait 1 million

La société ECT va signer un chèque d’un million d’euros au département pour pouvoir exploiter et étendre ses sites de stockage de déchets inertes à Villeneuve-sous-Dammartin et Annet-sur-Marne.

L’accord a été approuvé par le conseil départemental, vendredi 7 octobre. Il prévoit la mise en place d’une plateforme de recyclage d’un coût de 500 000 euros ainsi que la rénovation de toutes les routes autour des sites seine-et-marnais d’ECT en échange de la fin des recours devant le juge administratif contre les autorisations d’extension des sites accordées par le préfet.

Le protocole transactionnel pourrait ainsi mettre un terme au moratoire que l’assemblée départementale avait elle-même voté à l’unanimité le 25 mars dernier. La motion suspendait pour une durée de deux à trois ans tout projet d’extension ou de création de sites de stockage de matériaux inertes et exigeait le maintien du plan de prévention et de gestion des déchets de chantier (Predec) avec un plafond de 4 millions de tonnes de déchet. L’agrandissement des deux sites permettrait de traiter 1,5 million de mètres cube par an de déchets et plus de 6,8 millions de tonnes pourraient être stockées.

Jean-Jacques Barbaux, le président du conseil départemental, a justifié le revirement par « l’issue incertaine des recours judiciaires » et par « le combat du pot de terre contre le pot de fer ».

Les arguments ne convainquent pas Franck Rolland, co-fondateur du collectif Stop Déchets 77. « Le changement de fusil d’épaule est un mauvais signal lancé aux citoyens attachés à la qualité de vie de la population. Pourquoi la société ECT a t-elle proposé une somme aussi importante si elle était si sûre de gagner ? » se demande l’élu écologiste de Villeparisis qui estime que le maintien des deux recours administratifs aurait eu l’avantage de maintenir la pression sur le numéro 1 français de gestion de remblais et ainsi l’inciter à faire évoluer son modèle économique vers le recyclage.

80% des déchets du Grand Paris

Les opposants aux remblais  d’ECT dans le secteur rappellent que, cachés derrière les buttes et les collines, 80% des déchets de chantiers du BTP d’Ile-de-France, dont ceux du Grand Paris, atterrissent en Seine-et-Marne. Ils dénoncent le marché « juteux » du stockage des déchets, à 6 euros le mètre cube.

Bernard Corneille, conseiller départemental et maire d’Othis, tempête : « Nous travaillons chaque jour pour que notre territoire soit la vitrine de l’Ile-de-France pour les touristes arrivant de l’aéroport, mais il est devenu le local à poubelle ! » L’élu soulève un problème qui découlera du transport des déchets : « l’état des routes à cause de l’augmentation des passages de poids lourds ». Le site d’Annet est à proximité de la RN3. Annie, une habitante qui vit près de l’entrée de la décharge, constate : « Il y a entre 10 et 15 camions qui passent par heure ».

De son côté, la direction d’ECT affirme « vouloir être l’un des principaux acteurs de la future filière de recyclage et s’inscrire pleinement dans le projet de plateforme prévue à cet effet ainsi qu’à la réfection des routes autour des cinq sites ».

Son directeur de développement, Benjamin Tilliet, précise : « Le moratoire a été décidé dans le cadre du Predec voté par le conseil régional d’Ile-de-France en mars 2015, entré en application en juin 2015 et il est toujours en application, bien que le préfet de Région ait entamé un recours pour faire annuler le plan. ECT n’intervient aucunement dans la procédure initiée par la préfecture de Région pour faire annuler le moratoire du Predec de mars 2015 ». 

Il rappelle également que « le moratoire interdit pendant trois ans la création de nouveaux sites de stockage et l’extension de sites existants : tous les sites seine-et-marnais d’ECT respectent le moratoire, actuellement en vigueur ; ECT n’a donc pas demandé l’extension des deux sites seine-et-marnais qui serait aujourd’hui illégale compte tenu du moratoire ».

Le moratoire n’interdit pas le maintien de l’activité des sites déjà existants, comme ceux d’Annet-sur-Marne et de Villeneuve-sous-Dammartin dont les autorisations d’exploitation sont antérieures au moratoire, puisqu’elles datent respectivement de 2013 et de 2014. « Les deux sites sont aujourd’hui en activité, dans le respect de leur autorisation d’exploitation préfectorale » souligne Benjamin Tilliet.

Les autorisations données en 2013 et 2014 permettent à ECT, pour le site d’Annet-sur-Marne, de recevoir 12 524 000 tonnes à raison de 3 millions de tonnes au maximum par an, et pour le site de Villeneuve-sous-Dammartin 24 530 216 tonnes à raison de 3 800 000 tonnes au maximum par an. Le directeur ajoute encore : 

« La transaction que vous évoquez est le fruit d’un accord entre ECT et le conseil départemental de Seine-et-Marne qui a permis d’abréger le règlement d’une procédure juridique. L’accord a permis au Département de renoncer à deux procédures juridiques visant à annuler les autorisations d’exploitation des sites de Villeuneuve et d’Annet, alors même que dans la procédure contre l’arrêté d’autorisation d’exploitation du site d’Annet, il avait déjà été débouté une première fois par le tribunal administratif. Du côté d’ECT, l’accord a permis de répondre aux besoins de la SGP dans les délais requis et de pouvoir réaliser des investissements ayant du sens pour notre activité et répondant à la fois aux préoccupations du Département et des riverains en investissant dans une filière de recyclage, aux côtés d’autres entreprises seine-et-marnaise du secteur. Nous souhaitons en effet privilégier la valorisation dans le sens d’un moindre stockage et en contribuant à l’effort d’entretien des les infrastructures routières existantes ».

Les sites d’ECT en Ile-de-France

 

Sun-Lay Tan

Rédacteur en chef

Voir tous les articles de Sun-Lay Tan →